lundi 13 janvier 2014

Silence

Un matin, j'ai rencontré un papillon neuf offrant au ciel ses couleurs étincelantes venues d'un autre monde. Il allait simplement goûtant intensément chaque seconde de sa vie, il sait qu'elle sera courte, il la désire donc remplie. Surpris, il me raconte à quel point il est important pour lui de vivre maintenant, car il se souvient...

J'étais petit, enfermé dans un tunnel noir et étroit où il était impossible de bouger. Dans l'immobilité de ma prison, je me sentis mourir. Montant du plus profond de moi, je perçus, du vent, comme un mouvement incompréhensible. J'ai eu peur. J'ai senti l'abîme, le trou béant,l'obscurité, la fin du monde... La mort !

Et pourtant ! j'ai devant moi un magnifique papillon ! Mourir à un monde pour renaître à un autre, à un ailleurs. le insecte multicolore qui, par sa seule présence, rend grâce à la vie.

Jamais je n'aurais cru être si fier, si coloré, si grandiose. Je me suis métamorphosé à mon insu, prenant l'instant magique de transformation pour la fin de mon existence.


photo de Kriss de Niort, visible sur http-faaxaal.forumgratuit.ca

Je suis tranquille et lui souffle le long des ailes, que la mort est irréelle. Nous vivons toujours. A chaque rencontre, activité ou conversation, on laisse, on prend, pour se refaire, s'approprier la vie, surpassant la mort pour nous rapprocher de l'Être. Je le sais, car je le sens.

Pourquoi ? entends-je si souvent. Pourquoi ne puis-je pas vivre ma vie ? Pourquoi tout ce que j'installe autour de moi m'empêche de profiter pleinement de mes jours?

Ces paroles arrivent à moi transportées par le vent à travers les regards des gens croisés au hasard. J'aime leur dire que la vie est vraiment très simple. Peut-être est-ce justement pour cela qu'ils la conçoivent si compliquée ?

Il nous faut vivre dans l'éternel présent, car rien d'autre n'existe. L'instant sacré est celui que je vis maintenant et je prépare le temps futur en le ressentant intensément. Je sème toutes les vibrations nécessaires à la création harmonieuse et déterminante du demain qui ne peut exister en dehors d'aujourd'hui. Reconnaissons que le lointain est toujours inclus dans le maintenant. Chargée de fleurs et de paix, je désire continuer mon chemin à travers les sentiers andins, passant joyeusement par les villes et les montagnes, sous le ciel bleu qui me laisse deviner l'infini et la douceur de la continuité. Je laisse deviner l'infini et la douceur de la continuité. Je suis fière de parcourir les sentiers car les routes tracées en ces temps anciens sont colossales : constructions de pierres, pavées sur des distances trop longues pour être parcourues par un seul voyageur. Les Shaski transportent les messages, se relayant jour et nuit pour que l'Inca, le souverain, ait toujours en main les faits et gestes de ses contemporains. Avancer encore, mais on me retient, on me questionne sur présent éternel. Comment être ? Je dis qu'on ne peut pas utiliser hier pour justifier aujourd'hui, qu'il est inutile d'hypothéquer aujourd'hui pour préparer demain.

Comment comprendre cela si ce n'est à travers le silence de l'être : l'introspection, cette action de grâce  notre constante disposition. Je médite et je fais pénétrer le soleil en mon cœur, je me sens légère, je deviens UN, je sais que le mystère se résout de l'intérieur.

Assise devant la beauté indescriptible du majestueux Illimani, montagne sublime aux courbes blanches, me protégeant, je me sens unie. Je me sens unie, car elle est si haute, qu'à ses côtés je bascule dans l'univers, tellement coincée entre les nuages, que je ne sais plus très bien distinguer son corps blanc, de ces ouates traînant dans le ciel. Quelquefois, le soleil transforme complètement son apparence et je l'admire, bleue, floue, inaccessible.

Mais, surtout je me sens unie. J'aime sa présence qui, jour après nuit, me réconcilie si intensément avec la vie. Je marche, recueillie, je reçois toutes ses ondes qui m'unifient au vivant. Je suis montagne ! Je respire et rejoins ma source profonde, la méditation es le chemin le plus court jusqu'à l'espace infini, en dehors du temps. JE me sens vivante, devenant alors Créateur. Je peux m'entendre vivre par en dedans et m'aimer. Je désire ardemment communiquer que la respiration est le geste le plus intime que l'on puisse s'offrir. Comment faire pour que vous m'entendiez ? Il y a tant de bruit en vous, tout est trop rapide, linéaire, rationnel. 
Pour sentir l'extase, il faut du silence dans l'intimité de l'Etre !

Je suis silence !


lundi 6 janvier 2014

Récit d'une femme vagabonde...


Je suis aujourd'hui rendue ici dans mon grand voyage de découvertes et de réflexions. A chaque moment, la vie me rattrape pour me permettre un ressourcement intense. La montagne me transmet ses messages et l'oiseau, le maître condor, me soulève en plein ciel. A travers les nuages je salue la Lune et je remercie mon père le Soleil. Je reçois sa chaleur comme on reçoit une bénédiction. La montagne sacrée chante, elle est vivante. Je suis dans son ventre, je me couche sur elle et je sens palpiter ma mère la Terre, à chaque instant de ma vie. Elle me nourrit et je lui remets, en gage, mon énergie. Je prends soin de la Terre comme d'un amour. Le ciel me sourit et je m'esclaffe sous les étoiles. Les plantes me nourrissent et me transmettent tout ce dont j'ai besoin pour rendre grâce à l'Univers.

Je suis prêtresse andine.

Ma jeunesse éternelle m'amène par les chemins, je sens l'amour et je l'invite. Chaque oiseau, chaque plante ou chaque humain me reçoit et m'écoute, car je vis en contact avec l'invisible.

Je suis extase !

Le silence me transe, je contacte l'infini de l'intérieur. Je respire et j'arrête l'anarchie troublante des pensées venant de trop loin. Je me permets ainsi d'entendre mes intuitions.

A chaque instant, je choisis à nouveau ma vie.

Je suis shamane des Andes !

Je capte l'énergie qui se dégage des lieux anciens. Je perçois les messages de mes sœurs, ayant vécu en d'autres temps. Je m'identifie à la nature et elle me protège.

Je suis guérisseuse des hauts plateaux !

Mon pèlerinage m'amène à retourner là où j'ai vécu jadis. Je retrouve mes amies, mes frères, ces gens qui m'ont aimée et qui me reconnaissent. Je vis près du ciel en hautes montagnes, je suis sœur de la Lune. Je respire la nuit et me laisse transporter par sa resplendissante clarté ouvrant le chemin, illuminant les pierres que foulent mes pieds, avec respect.

Je suis femme vagabonde !

Daniela
Danièle Dufresne - La Shamade des Andes